Ces partenaires opérationnels, de plus en plus prisés par les fonds de capital-risque et les start-up ont désormais droit à leur propre formation. Pour être un bon « operating partner», l'expérience professionnelle seule ne suffit pas pour réussir sa mission.
La French Tech regorge de nouveaux métiers, pas toujours très innovants, si ce n'est dans leur intitulé de poste. Mais il en est un qui gagne en popularité ces dernières années : l'« operating partner », ou partenaire opérationnel en français.
Ce professionnel aguerri, missionné par les fonds d'investissement pour accompagner leurs participations, ou directement recruté par les dirigeants, a pour mission d'accompagner les start-up sur des sujets opérationnels variés : ventes, marketing, RH, gouvernance, finances…
Très répandu aux Etats-Unis, où il est devenu un rouage clé des fonds, le nombre d'operating partners en France a plus que doublé en cinq ans, passant de 76 à 185 entre 2019 et 2024, selon une étude de France Invest et du cabinet Alvarez & Marsal. Un essor qui pose la question des compétences nécessaires pour structurer ce rôle encore émergent, à l'image des nombreux « coachs » qui ont fleuri en France ces dernières années.
"On voit un certain nombre de personnes qui s'auto-proclament operating partner sur LinkedIn", remarque Franck Roger, qui vient de lancer l'Operating Partners Academy avec un certificat d'aptitude, destiné à former durant 150 heures les professionnels. "Il faut à la fois une solide expérience - souvent celle d'un ancien entrepreneur ou d'un cadre dirigeant - mais aussi une capacité à embrasser l'ensemble des enjeux d'une entreprise", poursuit-il.
En moyenne, les professionnels de ce métier cumulent 23 ans d'expérience, dont 17 en entreprise.
"Ils m'ont beaucoup aidé sur la structuration de mon comité de direction, les ressources humaines, l'équipe de vente… Ils peuvent intervenir sur un grand nombre de sujets et pour un primo-entrepreneur comme moi, c'est précieux. Mais il faut que ce soit sur demande, pas une personne qui vient et prend la boîte à ta place", indique Grégoire Hug, le cofondateur de la start-up WeeFin.
En d'autres termes, la posture compte autant que l'expertise : un bon operating partner ne prend pas la place du dirigeant, il l'accompagne. Il est un pair, pas un supérieur.
"Levée de fonds, pivot, international, moments de doute… Dans toutes ces périodes charnières, l'expérience opérationnelle de ceux qui ont déjà vu et vécu est clé" souligne de son côté David Bitton, asssocié, chargé de l'accompagnement opérationnel chez Serena, un fonds de capital-risque.
Mais encore faut-il bien choisir son partenaire. "Les prises de références et les retours d'entrepreneurs sont essentiels, mais il faut aussi multiplier les entretiens pour trouver la bonne personne", conseille-t-il. Il vaut aussi mieux privilégier une connaissance métier qu'une connaissance sectorielle.
Autre facteur clé : le stade de maturité de la start-up. "Pour les jeunes start-up, les enjeux clés tournent autour du produit adapté à un marché, quand en série A ou B, la force réside dans la vente et la gestion d'un conseil d'administration. Il faut trouver une personne expérimentée en fonction de ces situations", poursuit David Bitton.
Avec la fin de l'argent facile dans la French Tech les priorités et les besoins d'accompagnement évoluent. Alors qu'avant 2022, les levées de fonds étaient légion et qu'il fallait changer de taille et d'échelle à vitesse grand V, beaucoup de start-up repensent aujourd'hui leur organisation : cession, réduction des coûts, quête de rentabilité, recentrage sur les clients et les ventes…
Dans ce contexte, un mauvais choix peut coûter cher à l'entreprise. "L'un des principaux risques, en prenant des personnes qui croient maîtriser l'ensemble des leviers de performance d'une entreprise reste la perte de temps et d'efficacité", observe Franck Roger. Et le temps est l'un des actifs les plus précieux pour une start-up.
Camille Wong